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Ekniti Nitithanprapas

M. Ekniti Nitithanprapas a exercé les fonctions de Directeur général des services fiscaux de Thaïlande dès 2018, et joue un rôle essentiel dans la promotion de l’utilisation des technologies numériques et de l’analytique de données au sein de l'administration fiscale thaïlandaise. Il est notamment à l’origine du premier système de remboursement de la TVA utilisant la technologie Blockchain lancé à l’attention des touristes en Thaïlande.

Avant de rejoindre l’administration fiscale, M. Nitithanprapas a été nommé par le ministre des Finances de Thaïlande à différents postes : directeur général du Bureau de la politique des entreprises publiques, directeur général adjoint du Bureau de la politique budgétaire, ministre conseillé pour les affaires économiques et financières pour le Royaume-Uni et l’Europe à Londres, et Conseiller principal auprès du Directeur exécutif de la Banque mondiale à Washington D.C.

M. Nitithanprapas est titulaire d’une licence d’économie (mention bien) obtenue auprès de l’Université de Thammasat en Thaïlande, d’un master en économie politique de l’Université d’Illinois à Urbana-Champaign, et d’un doctorat en économie de la Claremont Graduate University, aux États-Unis.

 

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Réflexions

IISF : Quels vont être, à votre avis, les effets de la crise du COVID-19 sur la politique fiscale et l'administration de l’impôt en Asie et dans d’autres régions en développement ?

E.N. : La pandémie crée une situation fondamentalement différente de celle qui avait résulté de la précédente crise financière car elle a des effets à beaucoup plus grande échelle. Elle a frappé des entreprises de toutes catégories (des grandes comme des petites), a eu des répercussions sur un éventail plus large de secteurs économiques (au-delà du seul secteur financier) et n’a pas épargné les individus (riches ou pauvres).

La pandémie évolue aussi rapidement. Les administrations fiscales des pays du monde entier, y compris d’Asie et d’autres régions en développement, doivent pour cette raison se montrer agiles et réagir vite. Je pense que les administrations fiscales doivent se concentrer sur trois objectifs :

  1. Définir les « bonnes politiques » au bon moment et contribuer à alléger le fardeau pesant sur les contribuables tout en assurant la viabilité budgétaire.
  2. Fournir le « bon service » adapté à la demande de chaque catégorie de contribuables en mettant à profit la puissance de la technologie et des données. 
  3. Assurer un « bon recouvrement des recettes » ou faire en sorte que le montant des recettes perçues soit à la hauteur de l'objectif, voire le dépasse, en élargissant la base d’imposition, en promouvant la discipline fiscale et en mobilisant des sources de recettes supplémentaires.

 

IISF : Pensez-vous que le durcissement des contraintes budgétaires signifiera une moindre tolérance envers la fraude et l’évasion fiscales ? Ou bien les pays en développement ont-ils d'autres priorités ?

E.N. : Au niveau mondial, les États sont confrontés à une diminution de la marge de manœuvre budgétaire en raison des pressions croissantes s’exerçant sur les budgets et de l’endettement public résultant de l’intensification des programmes de dépenses et d’une décrue concomitante des recettes fiscales. De mon point de vue, l’évasion et la fraude fiscales demeurent des enjeux majeurs auxquels les pays en développement doivent s’attaquer et qui ont une incidence directe sur les impôts perçus.

Ces pays vont devoir pour ce faire axer leurs efforts sur l’élargissement de la marge de manœuvre budgétaire en trouvant de nouveaux moyens de lever des recettes fiscales. Les avancées technologiques favorisent l’apparition de nouveaux modèles d’affaires grâce auxquels des commerçants peuvent fournir des biens et des services à distance à des clients de n’importe quelle région du monde. Pour les administrations fiscales, cette évolution pose des questions fondamentales sur la manière dont les entreprises de l’économie numérique créent de la valeur et réalisent des bénéfices. La pandémie de COVID-19 a intensifié ces phénomènes. Les mesures de distanciation sociale ont contraint les gens à changer leurs habitudes quotidiennes et à faire appel aux services numériques. Toutefois, le système fiscal actuel ne prend pas convenablement en compte la création de valeur et les bénéfices réalisés par les entreprises de l’économie numérique. C’est pourquoi il est capital que les pays en développement appliquent une fiscalité juste et efficace à l’heure du numérique.

 

IISF : En tant que nouveau membre du Comité directeur de l’Initiative IISF, comment se concrétisera, selon vous, la réussite de l’initiative dans les années à venir ?

E.N. : J’adhère sans réserve au programme de travail de l’Initiative IISF pour 2021 et au choix des trois domaines appelant une exploration plus approfondie (Fiscalité et environnement, Fiscalité et contrats d’exploitation de ressources naturelles et Transformation numérique de l’administration fiscale) car ils peuvent permettre d’apporter une contribution importante à la coopération internationale en matière fiscale dans le cadre des programmes IISF.

L’un des domaines sur lequel je voudrais insister est la transformation numérique de l’administration fiscale, qui est encore, concernant l’initiative IISF, en phase exploratoire précoce. La crise du COVID-19 offre une occasion de repenser la stratégie des administrations fiscales en l’orientant vers plus de numérique. La transformation numérique et l’analyse de données sont indispensables pour pouvoir vraiment espérer atteindre des objectifs essentiels de politique fiscale tels que l’élargissement de la base d'imposition, l’accroissement de la transparence et l’allègement des contraintes liées au respect des obligations fiscales.

En outre, l’échange de renseignements, qu'il s’agisse de l’échange de renseignements sur demande, de l’échange automatique de renseignements ou de l’échange de renseignements spontané, est appelé à devenir un outil important au service de la vérification et du recouvrement de l’impôt pour toutes les administrations fiscales. Nous allons devoir concevoir une infrastructure adéquate et renforcer nos capacités d’analyse de données pour être en mesure d’utiliser les données massives obtenues grâce à l’échange de renseignements.

Le partage d’expérience et les transferts de connaissances entre les pays possédant déjà une expérience de l’utilisation des données tirées de l’échange de renseignements et ceux qui débutent dans ce domaine sont essentiels pour accélérer le développement des réseaux d’échange de renseignements. Les progrès en ce sens seront l’un des indicateurs importants du succès de l'Initiative IISF.

Celle-ci va se pencher sur la manière dont elle peut apporter une contribution déterminante à la transmission de conseils d’experts et au partage d’expérience dans ce domaine.